HISTOIRE DU COSTUME - DES ORIGINES

François-Marie Grau

Les origines mythologiques du costume sont variées et lui donnent, selon les époques et les traditions, des fonctions diverses. Les origines historiques ne sont pas plus assurées et se perdent dans la nuit des temps. La faible connaissance que nous avons des conditions de vie au paléolithique ne permet pas d’établir la naissance du costume sur des bases scientifiques solides. Tout juste peut-on assurer que le costume, en Occident, apparaît quelque part entre 40 000 et 200 000 ans avant notre ère.


 LA MYTHOLOGIE

Tout ouvrage sur l’histoire du costume commence par l’invocation rituelle des sources bibliques et l’on ne dérogera pas à la tradition. La Genèse, mythe fondateur de l’Occident, donne en effet au costume une double fonction : ménager la pudeur de l’homme et assurer sa protection contre les intempéries.

Ainsi, lorsque Adam et Ève eurent goûté du fruit de l’arbre de la connaissance, « leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus ; et cousant des feuilles de figuier, ils se firent des pagnes » (Genèse 3, 7). Ce sentiment de pudeur et de péché mêlés est si fort que l’homme se cache à l’appel de Dieu : « Yahvé appela l’homme et lui dit : “Où es.tu ?” » Il dit : « J’ai entendu ton bruit dans le jardin et j’ai eu peur parce que je suis nu, et je me suis caché » (Genèse 3, 9). Mais les feuilles de figuier, si elles sont suffisantes à la pudeur, ne le sont pas pour protéger l’homme dans un monde hostile ; aussi, lorsque Dieu les chasse hors du Jardin d’Éden, il « fit à l’homme et à sa femme des tuniques de peau et les en revêtit » (Genèse 3, 21). Ces passages de la Genèse sont importants en ce qu’ils imposent, implicitement, une certaine rigueur vestimentaire : plus qu’un don de Dieu, le costume est une marque d’infamie, le signe de la déchéance de l’homme.

Le costume est également, dans la tradition biblique, moyen de dissimulation. Jacob l’utilise pour tromper son père aveugle, Isaac, et obtenir sa bénédiction en lieu et place d’Esaü : « Alors Isaac, son père, lui dit : “Avance donc et embrasse-moi, mon fils.” » Il s’avança et l’embrassa. Quand Isaac sentit l’odeur de ses vêtements, il le bénit et dit : « Oui, l’odeur de mon fils est comme l’odeur d’un champ qu’a béni Yahvé ! » (Genèse 27). Le Talmud complète ce dernier passage et lui consacre de nouveaux développements : la tunique de peau faite par Dieu pour Adam devient le manteau royal de Jacob, le symbole de son élection divine à la tête d’Israël. Le costume est alors investi comme signe, ce qui est plus conforme à la réalité historique.

On trouve encore d’importantes références au costume dans de nombreuses mythologies barbares, nordiques ou celtiques, qui lui consacrent une large place. Mais, plus rigoureusement, l’on recherchera dans les découvertes archéologiques les premières traces du costume.


LA PRÉHISTOIRE


1. Le paléolithique

L’archéologie nous apporte de nombreux enseignements : s’il est peu vraisemblable qu’homo habilis puis homo erectus, dont les caractéristiques se rapprochent plus du singe que de l’homme moderne, se soient habillés, il n’est toutefois pas impossible qu’ils aient utilisé des peaux de bêtes pour se protéger des grands froids : certains silex taillés qui leur sont attribués font penser à des grattoirs pour les peaux ; il est avéré qu’homo sapiens (apparu il y a environ 200 000 ans), pour des raisons tenant probablement plus, du moins dans les premiers temps, à la rigueur du climat qu’à la pudeur,
connaissait le costume.

Les premières aiguilles, ainsi qu’en témoignent en particulier les collections du Musée des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, sont l’œuvre de l’homme de Cro-Magnon (homo sapiens sapiens) et de l’homme de Néandertal (homo sapiens neandertalensis). Tous deux durent en effet affronter plusieurs glaciations, et le vêtement devint une condition de survie. Chasseurs, ils se vêtirent très naturellement de peaux de bêtes, d’abord grossièrement assemblées, puis cousues. Ancêtre direct de l’homme moderne, l’homme de Cro-Magnon, qui évince l’homme de Néandertal vers 30000 av. J.-C., invente l’aiguille à chas et laisse de très nombreux vestiges de ses habitudes vestimentaires.

Il est indéniable que la fonction principale du costume, en période glaciaire, reste la protection contre le froid, mais les préoccupations esthétiques de l’homme de Cro-Magnon n’en sont pas moins évidentes, ainsi qu’en témoignent les très nombreuses parures qui ont pu être retrouvées, telles que des pendeloques en ivoire, des perles d’ivoire ou d’os, de dents de renard, d’ours ou de cerf ornées de traits, de croix ou de triangles, des coquillages, des pattes d’antilopes, des phalanges et griffes de lapin, des vertèbres de poissons percées à la base pour être suspendues...

À l’époque aurignacienne (40000 environ av. J.-C.), un nouveau pas est franchi avec la multiplication de ces parures mais aussi de tout un matériel de matières colorantes, ocre rouge ou jaune, hématite, de palettes portant des taches de couleur, de tubes d’os ou de canons de cervidés ayant contenu des poudres de couleur, qui évoquent le souvenir de la peinture corporelle. La principale motivation du costume ne semble plus être la protection contre les intempéries mais bien la signification de valeurs esthétiques, religieuses ou sociales.

Il est en conséquence probable que le costume de l’homme de Cro-Magnon, en particulier à la fin du paléolithique, était beaucoup plus varié et élaboré que la traditionnelle imagerie populaire des peaux de bêtes ne le laisse supposer. Le vêtement du paléolithique devait incorporer de délicats tissus d’herbe et d’écorce, des fibres végétales tressées, des plumes, des fourrures ornées de perles, voire des houppes de laine, des tresses de lin, de poils colorés. La mauvaise conservation des vestiges de costumes paléolithiques, la faible connaissance des mœurs de ces époques reculées ne nous permettront cependant sans doute jamais d’en apporter la démonstration avec certitude.

2. L’homme moderne

La fin de la dernière glaciation, qui coïncide avec l’émergence de l’homme moderne, lui permet, au gré des métissages et des conquêtes, de s’étendre au monde entier. La modification de la faune et de la flore, au mésolithique (8000 à 3000 av. J.-C.), lui donne accès à de nouvelles matières premières, bien que l’essentiel du costume ait dû rester constitué de fourrures et de peaux. Au néolithique (3000 à 2000 av. J.-C.), alors qu’apparaissent déjà, en Orient, les premières civilisations, l’Occident franchit à son tour une nouvelle étape décisive : l’agriculture et l’élevage remplacent la cueillette et la chasse, les populations se sédentarisent, le commerce connaît son premier grand essor. C’est de cette époque, si l’on en croit les fragments de tissus qui nous sont parvenus, que date le tissage de la laine et du lin. Néanmoins, aucun vêtement du mésolithique ou du néolithique n’ayant pu traverser les âges, l’on reste là encore assez impuissant à en décrire les formes, et l’historien du costume s’en trouve réduit aux conjectures.

Le costume de l’âge du bronze (2000 à 1000 av. J.-C.) et de l’âge du fer (1000 à 50 av. J.-C.) nous est moins étranger grâce aux différentes découvertes archéologiques, faites pour la plupart en Europe du Nord. Les principaux renseignements sur le costume à l’âge du bronze viennent de tombes du Jutland. Les hommes y portent une robe de laine, ceinturée à la taille, tombant aux genoux, ou une jupe dans certains cas, un manteau ovale jeté sur les épaules, ainsi qu’un bonnet cylindrique ou une calotte de laine ; les femmes, une jupe formée de cordelettes pendant d’une bande de tissu enroulée autour de la taille, ou une robe longue descendant jusqu’aux chevilles, un corsage moulant en laine, avec des manches allant jusqu’aux coudes, un filet tressé ou une petite capeline de laine en guise de coiffure, de nombreux bijoux de bronze ou d’or.


L'ANTIQUITÉ


Le costume des premiers temps historiques est relativement mieux connu. Les grandes civilisations, de l’Égypte à Byzance, de par leur richesse et leur rayonnement culturel, font accéder le costume au rang d’art majeur.


I. L’Égypte

De 3 200 à 525 av. J.-C., l’Égypte pharaonique fait l’objet d’une étonnante stabilité – deux cent sept pharaons et vingt-six dynasties se succèdent en trois millénaires – et nous laisse, avec ses sépultures, ses sculptures, ses monuments, de nombreux témoignages de sa beauté.

Compte tenu de la douceur du climat, le costume égyptien est simple et léger. Le nu occupe au demeurant une place importante, bien que les seuls personnages représentés nus soient des domestiques. Les tissus utilisés sont presque exclusivement d’origine végétale, principalement de lin, matière légère et facile à laver, qualité précieuse pour une civilisation exigeante en matière d’hygiène. La laine fut également utilisée, mais, d’origine animale, elle était considérée comme impure, et n’était réservée qu’à des usages très limités. Dans le même souci de pureté et de propreté, toutes les étoffes étaient blanches.

Pendant l’Ancien et le Moyen Empire (jusqu’en 1500 av. J.-C.), la pièce principale du costume masculin est un pagne de lin, la shenti, drapé autour des reins et maintenu par une ceinture. La tunique n’apparaît qu’aux alentours de 1580 av. J.-C. : faite d’un tissu de lin à demi-transparent, la calasiris est une ample tunique cousue et sans manches, savamment plissée à l’aide d’un empois à base de gomme. Le manteau égyptien, le sindôn, simple drap de lin rectangulaire, peut être porté de diverses manières, en jupe, noué autour de la taille, suspendu autour du cou, fixé aux épaules, ou encore rejeté sur l’épaule à la façon des Hindous. Les hommes se rasaient la tête et portaient des perruques (un simple bonnet de feutre pour le peuple) de lin noir torsadé ou natté.

Le costume féminin est tout aussi simple et léger. On distingue deux types de robes. Le premier, surtout porté sous l’Ancien et le Moyen Empire, est une ample robe à plis horizontaux cousue à un corsage aux manches étroites et longues. Le second, dont on trouve des représentations à toutes les époques, est une robe en forme de fourreau commençant en dessous de la gorge et suspendue par des bretelles, tantôt passant entre les seins, tantôt assez larges pour les recouvrir. Les femmes du peuple l’agrémentent d’une résille de perles multicolores autour de la taille tandis que les femmes de qualité la rehaussent de dessins tissés ou brodés, voire de rubans de couleur. À partir de la XVIIIe dynastie, les tissus se font plus légers, et les femmes portent de larges draperies semi-transparentes, arrangées de diverses manières, au-dessus de la robe. Les femmes se rasaient elles aussi la tête et portaient des perruques, parfois décorées, tout spécialement sous le Nouvel Empire, de fleurs, de rubans, de passementeries ou de bandeaux.

Le costume militaire ne se fixe que sous Ramsès II (1292-1225 av. J.-C.), qui constitue la première armée régulière. Les simples soldats ne portent qu’un pagne, parfois orné d’un tablier de cuir tombant en arrière. Le casque étant inconnu des Égyptiens, la tête est protégée par une perruque matelassée ou un bonnet d’étoffe épaisse. Les officiers supérieurs portent la calasiris ainsi qu’une cuirasse de lin tressé ou de cuir.

II. La Grèce

Le costume grec de la période classique se compose d’une tunique et d’un manteau. La plupart des vêtements, constitués de laine, de lin, de coton, voire de soie après l’invasion des Perses, font une large place au drapé et sont, contrairement à ce que pourrait laisser supposer le caractère monochrome des antiquités grecques, de couleurs très diverses.

L’élément primitif du vêtement masculin est une pièce de tissu de laine rectangulaire portée drapée ou ceinturée et fixée par une agrafe sur l’épaule, en tunique, l’exomide, qui sert également de couverture pour la nuit. Le chiton, de plus large dimension, est une tunique de lin, introduite à Athènes par les Ioniens au milieu du vie siècle avant J.-C. Cousue sur un côté, bouffant au-dessus de la ceinture, elle est retenue par une fibule sur l’épaule gauche ou, plus fréquemment, sur les deux épaules. Le manteau, ou himation, couvre le dos et les épaules, un pan rejeté sur le bras ou l’épaule gauche. Il est porté avec une tunique ou seul sur le corps nu comme de nombreuses représentations le laissent penser. Jusqu’aux guerres médiques, la barbe est d’usage et les cheveux sont longs et bouclés (les Grecs n’hésitaient d’ailleurs pas à recourir aux perruques), puis la mode passe aux visages imberbes et aux cheveux courts.

Le costume féminin est de la même simplicité et de la même élégance. Les femmes doriennes portent le péplos, rectangle de laine plié par le milieu et agrafé sur les deux épaules, ce qui laisse un des côtés ouvert. Le bord supérieur du péplos pouvait être rabattu à l’extérieur, jusqu’à la taille, et ceinturé. À l’époque ionienne, la tunique en lin, le chiton, évince progressivement le péplos. Le chiton féminin est différent de son équivalent masculin en ceci que les ouvertures laissant passer les bras sont pratiquées dans l’encolure et non dans les coutures latérales. Un plissé serré est également réalisé dans le sens de la hauteur. Au-dessus de la tunique, les femmes portent le manteau masculin, l’himation, mais drapé en sens inverse, ainsi que, à l’époque hellénistique, un manteau de lin, le pharos, assorti d’une longue écharpe à l’agencement compliqué. Des coiffures élaborées complètent ces costumes. À l’époque ancienne, les cheveux sont séparés en deux bandeaux et se prolongent dans le dos en longues boucles. La coiffure classique se compose de deux bandeaux ondulés relevés par un ruban et terminés par un chignon. À l’époque hellénistique, enfin, les cheveux sont relevés et liés au sommet de la coiffure par un nœud. L’usage des couvre-chefs est attesté ; des chapeaux de paille, des bonnets de feutre, de diverses formes, protègent du soleil.

Le costume militaire est assez riche. L’infanterie lourde est revêtue de cuirasses à écailles métalliques, cousues ou rivées, prolongées par des lambrequins, renforcée de jambières en bronze, les cnémides, et de casques dotés d’un cimier à panache, de nasals et de couvre-joues, fixes ou mobiles. L’infanterie légère porte sur la tunique une cotte faite de tissus croisés, doublés et feutrés, serrée à la taille par une ceinture de bronze. Les cavaliers se protègent au moyen de justaucorps de cuir, dotés de disques de bronze, et de jambières et d’épaulières de cuir. Les militaires, mais aussi les éphèbes, portent la chlamyde, manteau de laine assez court fixé à l’épaule par une fibule.

III. Rome

Le costume romain, fait de tissus de laine, de lin, de coton et de soie, richement colorés et décorés de franges, de galons ou d’empiècements, marquera l’apogée du drapé. Il se compose essentiellement d’un pagne, d’une ou plusieurs tuniques et de la toge.

Aux débuts de la République, le Romain porte un simple pagne de lin, le subligaculum, puis une et deux tuniques superposées, la subucula et la tunica exterior. La tunique, cousue, flottante ou serrée à la taille, est dotée de larges manches (la dalmatique) ou en est dépourvue (le colobe) ; elle descend jusqu’à mi-cuisse, puis jusqu’aux genoux et, au iie siècle après J.-C., jusqu’aux chevilles. La caracalla, tunique longue fendue par-devant et assortie d’un capuchon, s’étendra à tout l’Empire au début du ive siècle.

La trabée, ou toge courte, pièce d’étoffe taillée en demi-cercle, tire, quant à elle, ses origines du costume des Étrusques. Les premiers Romains la portaient directement sur le subligaculum (elle devait alors, à l’image de l’exomide, faire à la fois office de tunique, de manteau et de couverture), puis par-dessus les tuniques, serrée près du corps, immobilisant le bras droit plaqué contre le torse dans le drapé dit « de l’orateur ». Au dernier siècle de la République et au début de l’Empire, la toge s’élargit et s’allonge. Son drapé est si complexe qu’il nécessite l’aide d’un esclave : l’étoffe (une pièce de 6 m sur 2) est passée sur l’épaule gauche, où elle forme un premier ensemble de plis, puis est déployée dans le dos, ramenée sous le bras droit, relevée sur la poitrine, où elle forme un second ensemble de plis... tandis que le pan posé en premier lieu sur l’épaule gauche sera tiré par le haut de manière à former un troisième ensemble de plis sur la poitrine. La toge disparaîtra progressivement pour n’être plus portée que par les sénateurs et les prêtres, au fur et à mesure que les Romains, à la tête d’un vaste empire, emprunteront les habitudes des peuples colonisés. À compter du iie siècle après J.-C., elle est remplacée, en dehors des cérémonies, par un manteau léger tiré du costume grec, le pallium, par la saie gauloise, par la lacerne, long manteau ample pourvu d’un capuchon et ouvert sur le devant, ou encore par la paenula, sorte de pèlerine fermée à capuchon.

Le costume féminin ne se distingue pas fondamentalement du costume masculin. Il comporte néanmoins quelques vêtements spécifiques. Les Romaines portent dans les premiers temps, outre un pagne et le strophium, ancêtre du soutien-gorge, la toge qui est rapidement remplacée par la stola, ample et longue tunique de dessus richement plissée, maintenue sur les hanches et sous les seins par deux ceintures et portée au-dessus de la subucula. Au-dessus de la stola, se drape une pièce de tissu rectangulaire, la palla, retenue par une fibule sur chaque épaule et qui sert de manteau. Dans les milieux populaires, la palla est remplacée par la caracalla ou la paenula masculines. Les coiffures sont simples sous la République, les cheveux étant séparés par une raie médiane et ramenés en chignon ou en nattes sur la nuque, et complexes sous l’Empire, avec tout un luxe de tresses, de frisures, de bouclettes, de résilles et de rubans.

Le costume militaire fait une large place aux équipements de protection : les légions romaines portent, sur une courte tunique de laine, divers types de cuirasses associant le cuir et le fer. Sous la République, cette cuirasse peut être faite de lanières de cuir superposées, ou encore d’une simple tunique de cuir, renforcée d’écailles de métal ou d’une cotte de maille. Sous l’Empire, elle se compose de deux plaques de métal réunies par des lames de fer articulées. Les casques, de bronze puis de fer, sont assortis de protège-nuques, de visières, voire de protège-joues, ainsi que d’un anneau au sommet, destiné tant à en faciliter le transport pendant les marches qu’à dévier les coups francs portés à la tête. Les jambes, parfois protégées de cnémides, sont nues, jusqu’à l’adoption d’une culotte inspirée des braies gauloises après la guerre des Gaules. Les légions romaines empruntent enfin leurs manteaux au costume civil : saie, lacerne ou paenula. Officiers supérieurs et empereurs portent, quant à eux, de riches costumes d’apparat, la plupart du temps une cuirasse moulant le torse, éventuellement rehaussée de ciselures, assortie de lambrequins et accompagnée d’un large manteau de pourpre.

Bien après la disparition de l’Empire, l’influence du costume romain restera grande non seulement sur l’Empire byzantin, qui perpétue sa tradition jusqu’au xve siècle, enrichie des apports de l’Orient, mais aussi dans l’ensemble des pays conquis et sur l’Europe médiévale. Le costume de Rome restera, comme son architecture, sa littérature et ses lois, une source constante d’inspiration de l’Occident.

IV. Byzance

Le costume de l’Empire byzantin conserve naturellement les principales caractéristiques du costume romain, du moins pour le costume de cour : l’Empire byzantin n’a, en effet, laissé que très peu de témoignages sur le costume populaire dont on peut penser qu’il était resté d’inspiration orientale. Sous l’influence de l’Orient, il lui emprunte néanmoins ses somptueuses étoffes et son goût du luxe.

Le costume masculin reprend plusieurs éléments du costume romain, légèrement modifiés. Les hommes portent une ou deux tuniques superposées (la tunique du dessus est fendue devant ou sur le côté de manière à laisser apparaître la tunique du dessous), longues ou courtes selon l’époque, serrées à la taille, avec des manches étroites, sur un pantalon flottant d’origine perse. Une chlamyde, qui remplace la toge des consuls romains portée dans les premiers temps de l’Empire, est agrafée sur l’épaule droite. Diverses décorations, aux épaules de la tunique de dessus (callicules), ou sur la chlamyde (le tablion), alourdissent le costume des dignitaires. Le visage est imberbe et les cheveux courts, à la mode romaine, jusqu’à la réapparition de la barbe, à l’orientale, vers le viiie siècle.

Le costume féminin s’inspire lui aussi du costume romain. Il se compose de deux tuniques, une tunique de dessous, à manches longues et descendant jusqu’aux pieds, et une tunique de dessus, à manches courtes et ceinture haute. La tunique de dessus est parfois relevée obliquement de la cheville au genou pour laisser entrevoir le pagatium, bande d’étoffe tombant entre les deux tuniques. L’ensemble, décoré de claves, de callicules et de divers bijoux, est complété par une chlamyde qui se porte de diverses manières selon les époques. Les cheveux, arrangés à la mode grecque, s’assortissent de rubans, d’une coiffe (calautica) et d’un long voile frangé (mavort).

Ce qui distingue fondamentalement le costume byzantin du costume romain, ce sont les étoffes. Au carrefour de l’Orient et de l’Occident, maîtresse des principales routes commerciales, Byzance importe en effet des soieries chinoises, des cotonnades et du lin égyptiens, puis produit elle-même ces étoffes, aux riches décors de fleurs, d’animaux fabuleux, de scènes bibliques ou de motifs géométriques qui sont autant de symboles de la prospérité d’un empire qui durera onze siècles.

Byzance subira en outre l’influence croissante du costume oriental, avec l’apparition du turban, à partir du ve siècle, du cafetan perse au xiie siècle ou de la granatza, grande robe à manches longues assyrienne.

Par François-Marie Grau dans "Histoire du Costume",Presses Universitaires de France (PUF), 2007, chapitres I et II.  Dactylographié et adapté pour être posté par Leopoldo Costa.

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